La place du formateur lors des formations des membres des comités sociaux
Comme suite à une expérience récente d’un de nos formateurs dans le cadre d’une formation « Présider et animer un CSA », faisant suite à des formations pour les membres élus du CSA, les réactions suscitées par ces formations auprès des représentants de l’administration m’ont conduit à m’interroger d’une part sur le rôle et la place d’un formateur, dans le cadre de ces formations, d’autre part sur l’avantage d’une formation commune..
Dans les faits, un élu a, lors de la première réunion du CSA, posé une question sur le mode de délégation utilisé dans le cas d’espèce par la présidente. Cette question il l’a posée car le formateur a expliqué les règles en la matière lors de la formation et qu’il voulait connaitre le choix. Sa formulation a aussi été peut-être abrupte. En tout cas, cette question a dérangé la direction car elle n’y était pas préparée. La réunion en a été perturbée et la direction offusquée.
Alors quelle place pour le formateur ?
S’il est évident que son impartialité ne doit pas faire de doute, il n’a pas non plus à occulter les parties de programme qui pourraient créer un différend entre les parties.
Il est vrai aussi que son intervention ne doit pas être cause de tension sociale mais en même temps comme je l’écrivais au client concerné : « Le dialogue social n’a pas à être angélique et peut parfois être rugueux mais il doit permettre d’avancer dans l’intérêt tant des agents que de l’administration ».
Les règles du dialogue social dans la fonction publique sont en train de se rapprocher de plus en plus de celles du secteur privé et à sortir du cadre des seules instances de concertation traditionnelles.
La loi du 6 août 2019 a habilité le gouvernement à prendre par ordonnance toutes les mesures afin de favoriser, aux niveaux national et local, la conclusion d’accords négociés. « L’objectif est de promouvoir le rôle et la culture de la négociation et d’en développer la pratique, en particulier aux niveaux de proximité qui constituent le quotidien des agents, en vue de favoriser à tout niveau, y compris à l’échelle d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public hospitalier, social ou médico-social, la conclusion d’accords négociés ». La conclusion d’accord négocié ne peut se faire que dans le cadre d’un dialogue franc et qui doit forcément dépasser la simple consultation des représentants du personnel.
Si une question relative à une règle juridique est déjà considérée comme un dépassement du rôle des représentants du personnel qu’en sera-t-il des sujets de négociation ?
La négociation se doit d’être un échange entre les parties, chacune apportant tour à tour des propositions et des contre-propositions pour faire avancer la création d’un accord.
Alors que faire pour les formations des comités sociaux ?
Ce que CUMEO propose à ses clients, c’est ce que nous proposions déjà lors des formations des membres du CHSCT, c’est de faire une formation des membres du CSA, CST, CSE et non une formation des seuls membres élus du CSA, CST, CSE.
Le comité social comprend, outre son président, le responsable ayant autorité en matière de gestion des ressources humaines ainsi que des représentants du personnel. Il est bon que tous puissent entendre ensemble la même parole. Il est même envisageable d’y adjoindre des personnes qui seront amenées à y participer à titre consultatif comme le conseiller ou l’assistant de prévention pour les CSA, le médecin de la CME pour le CSE…
Cette solution nous l’avons déjà testée et validée à maintes reprises pour le CHSCT mais elle semble plus difficile à mettre en œuvre pour les comités sociaux. Est-ce la conséquence de la présence des questions générales plus « politiques » de l’ex-comité technique qui supplantent les questions jugées plus pragmatiques des CHSCT ? Ou est-ce une crainte devant les nouvelles dispositions mal maitrisées qui pousse à faire des formations différentes pour les uns et les autres ? Ou est-ce encore la durée des formations obligatoires qui rebutent les membres de l’administration à y participer ?
En tous cas la conséquence immédiate de cet état de fait, c’est de ne pas se permettre d’avoir un échange durant un temps où il n’y a aucun enjeu majeur et où les questions peuvent être posées sans apparaitre dans un procès-verbal.
Certains objecteront que la formation peut aussi en pâtir du fait d’une moindre liberté des représentants du personnel qui ont en face d’eux leur hiérarchie. Cette objection pour aussi compréhensible qu’elle soit ne doit pas être, en fait, un frein il en sera de même lors des réunions du comité social et avec un enjeu plus immédiat.
Pourquoi ne pas s’inspirer du réseau Format Dialogue et des formations communes ?
À ce titre, il y a possibilité de s’inspirer des dispositions de l’article L.2212-1 du code du travail qui stipule : « Les salariés et les employeurs ou leurs représentants peuvent bénéficier de formations communes visant à améliorer les pratiques du dialogue social dans les entreprises, dispensées par les centres, instituts ou organismes de formation. L’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle apporte son concours à la création et à la mise en œuvre de ces formations ».
CUMEO fait partie des organismes de formation qui ont rejoint en premier le réseau de l’INTEFP depuis le début de la démarche Format Dialogue et c’est cet esprit que nous avons tenté de mettre en œuvre au travers des formations CHSCT proposées tant aux représentants du personnel qu’aux représentants de l’administration.
CUMEO tient à signaler que lors des formations CHSCT communes aux représentants du personnel et aux représentants de l’administration, il n’y a eu aucune pression ni d’un côté ni de l’autre pour imposer des axes de formations. Les positions divergentes ont fait l’objet de discussions entre les parties éclairées par les apports du formateur. Certains membres représentants l’administration n’ont pas toujours pu suivre l’intégralité de la formation mais ils y ont participé en fonction de leur agenda chargé mais de nombreuses mises au point ou décisions ont vu jour.
Cette idée de formation commune est d’ailleurs inscrite dans l’article 94-II du décret n°2020-1427 du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d’administration dans les administrations et les établissements publics de l’État modifié pour la formation SSCT de 3 jours qui est, en tout ou en partie, assurée conjointement à l’intention des représentants du personnel au CSA ne participant pas à la formation spécialisée et des représentants de l’administration (article 94-II).
La place du formateur dans le cadre de formation commune
Les formations communes reposent sur quatre principes pédagogiques :
- Neutralité et équidistance du formateur entre les parties afin de créer les conditions d’une confiance mutuelle et de permettre l’expression de la pluralité des points de vue, sans jugement.
- Pédagogie centrée sur la relation: prendre conscience que la qualité de la relation a des conséquences sur la qualité des processus et des résultats
- Partage de points de repères et d’élément de vocabulaire communs pour mieux se comprendre
- Animation, modalités et moyens agiles, interactifs et collaboratifs, pour développer l’intelligence collective